LES TENTATIVES DE SUICIDE
Source du chapitre : Santé Publique France 2019 & ONS 2018 – Etat de L’état de santé de la population en France 2017 & baromètre 2017
L’exploitation du PMSI-MCO (Programme de médicalisation des systèmes d’information en médecine, chirurgie et obstétrique) permet de suivre les nombres et taux d’hospitalisation pour TS. L’ analyse des données du PMSI-MCO est circonscrite aux tentatives de suicide hospitalisées dans les services de médecine et chirurgie, incluant les séjours en unités d’hospitalisation de courte durée (UHCD) des services des urgences. Toutefois, elle ne prend pas en compte les patients passés aux urgences après une tentative de suicide mais non hospitalisés, ni ceux qui sont hospitalisés en psychiatrie, directement ou après leur passage aux urgences, sans hospitalisation préalable dans un service de médecine. En effet, les hospitalisations en établissement psychiatrique après une tentative de suicide sont très mal renseignées dans le système d’informations hospitalier.
Le nombre de séjours hospitaliers pour TS dans les établissements de courte durée était de plus de 100 000 par an entre 2008 et 2011. À partir de cette date, ce nombre a diminué progressivement, atteignant un peu moins de 89 000 hospitalisations en 2016 et 2017 (tableau). Chez les hommes comme chez les femmes, le ratio entre le nombre de séjours et le nombre de patients est resté constant à 1,15 durant toute la période étudiée. Ainsi, le nombre annuel de patients hospitalisés pour TS a fluctué autour de 90 000 entre 2008 et 2011, puis a diminué progressivement pour atteindre environ 77 000 patients en 2016 et 2017. Quelle que soit l’année, 89,5% des patients ont eu 1 seul séjour pour TS au cours de la même année civile, 8% en ont eu 2 et 2,5% en ont eu 3 ou plus. La part relative des femmes hospitalisées pour TS est passée de 63,5% en 2008 à 61,1% en 2017, réduisant ainsi l’écart entre les deux sexes. Globalement, le taux d’hospitalisation pour TS en France est passé de 17,4 séjours pour 10 000 habitants en 2008 à 15,1 pour 10 000 en 2017 (figure 1). La diminution n’était retrouvée que chez les femmes, passant de 21,7 pour 10 000 en 2008 à 18,0 pour 10 000 en 2017, tandis que chez les hommes, l’évolution annuelle des taux standardisés n’était pas significative (13,0 en 2008 et 12,2 en 2017). Chez les femmes, la diminution des taux entre 2008 et 2017 est estimée à 1,6% par an , évolution surtout marquée entre 2010 et 2013. Entre 2013 et 2017, aucune différence significative n’est observée dans l’évolution des taux féminins.
Selon le sexe et l’âge
Quelle que soit l’année étudiée, les taux d’hospitalisation pour TS par âge étaient plus élevés chez les femmes que chez les hommes, sauf au-delà de 85 ans. Toutefois, à partir de 2012, le taux d’hospitalisation des hommes de 30-34 ans s’est rapproché du taux féminin, le dépassant même à partir de 2015 et de fait, en 2017, le taux masculin était de 16,6 pour 10 000 contre 15,9 chez les femmes. Par ailleurs, les jeunes filles de 15 à 19 ans avaient systématiquement le taux de séjour le plus élevé (en moyenne 41 pour 10 000). Un deuxième pic est retrouvé chez les femmes entre 40 et 49 ans (environ 29 pour 10 000). Chez les hommes, contrairement à la courbe bimodale des femmes, les taux augmentaient avec l’âge, atteignant un maximum d’environ 20 pour 10 000 chez les 40-49 ans, puis diminuaient jusqu’à environ 5 pour 10 000 chez les 70-74 ans pour remonter ensuite dans les âges extrêmes. L’allure des courbes était la même quelle que soit l’année. Entre 2008 et 2017, la baisse la plus importante dans les taux par classe d’âge était observée chez les femmes entre 20 et 49 ans ; a contrario, chez les hommes au-delà de 50 ans, les taux par classe d’âge étaient supérieurs en 2017 à ceux de 2008.

Durée de séjour
Quelle que soit l’année, la durée médiane des séjours était d’un jour sans différence selon le sexe, les deux tiers des séjours ayant duré une journée ou moins. Toutefois, la durée médiane différait selon la classe d’âge. Entre 15 et 69 ans, elle était d’un jour, sans différence selon le sexe ni l’année. Chez les adolescents entre 10 et 14 ans, globalement sur la période étudiée, la durée médiane était d’environ 3 jours. Entre 2008 et 2017, cette dernière est passée de 2 à 3 jours chez les garçons et de 3 à 4 jours chez les filles. À partir de 70 ans, la durée médiane des séjours augmentait avec l’âge, atteignant 5 à 6 jours chez les 85 ans et plus (sans changement notable entre 2008 et 2017).
Comorbidités
L’existence d’une pathologie psychiatrique était notée dans 61% des séjours pour TS en moyenne (59% chez les femmes et 64% chez les hommes), avec une augmentation de 3 à 4 points entre 2008 et 2017. Les pathologies le plus fréquemment notées étaient la dépression (32% des séjours – 34% chez les femmes, 29% chez les hommes), les troubles mentaux et du comportement liés à l’alcool (23% des séjours – 18% chez les femmes, 32% chez les hommes) et les troubles anxieux (10% des séjours – 11% chez les femmes, 9% chez les hommes). Les autres troubles psychiatriques étaient plus rarement notés : troubles psychotiques (3%), troubles bipolaires (2%), troubles de l’alimentation (0,7%).
En 2017, les troubles dépressifs étaient moins souvent notés (-7 points) qu’en 2008, tandis que les troubles anxieux et les troubles liés à l’alcool l’étaient plus souvent (respectivement +4 et +2 points).
Les taux d’hospitalisation pour tentative de suicide varient fortement en fonction des régions avec des disparités importantes entre les départements d’une même région.
Selon le sexe et le département de résidence
Les quatre cartes de la figure 3 présentent les taux d’hospitalisation pour TS selon le département de résidence en 2008 et en 2017 chez les hommes et les femmes. Les taux départementaux étaient supérieurs aux taux nationaux en 2008 et 2017, pour les deux sexes, en Bretagne, Normandie et Hauts-de-France. En Provence-Alpes-Côte d’Azur, les taux étaient supérieurs aux taux nationaux en 2008 mais sont devenus proches du taux national chez les femmes et inférieurs au taux national chez les hommes. Dans certaines régions (Nouvelle-Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes, Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté), les taux départementaux étaient très contrastés, que ce soit en 2008 ou en 2017.

Les principales raisons déclarées par les personnes pour expliquer leur geste étaient : « familiales » (49,2% ; 37,7% des hommes vs 54,1% des femmes), « sentimentales » (40,8% ; 46,5% vs 38,4%), « professionnelles » (10,3% ; 15,6% vs 8,1%) et liées à leur état de « santé » (10,3% ; sans différence significative selon le sexe). Les 35-44 ans se distinguent des autres tranches d’âge par une surreprésentation des TS pour raisons familiales (57,7%). Par ailleurs, un peu plus de 6 suicidants sur 10 estimaient avoir reçu le soutien nécessaire pour s’en sortir (61,4%) ; 59,8% ont déclaré s’être rendus à l’hôpital et 52,3% avoir été suivis par un médecin ou un « psy » (64,7% parmi ceux ayant été hospitalisés vs 3 4 ,1% parmi ceux n’ayant pas été hospitalisés). Selon l’âge, les 18-34 ans étaient, en proportion, moins nombreux à s’être rendus à l’hôpital suite à leur TS (45,9% pour les 18-24 ans par rapport aux autres tranches d’âge et 51,2% pour les 25-34 ans). La prévalence des TS au cours de la vie chez les femmes a augmenté depuis 2005, passant de 7,6% à 9,9% en 2017, tandis qu’elle est restée stable chez les hommes sur la période 2014-2017 après avoir augmenté de 1,9 points entre 2005 et 2014 (figure 2). Chez les hommes, la prévalence des TS au cours des 12 derniers mois a connu son maximum en 2014, avec 0,68% de personnes concernées. Chez les femmes, une tendance à la hausse a été observée entre 2005 et 2014, la prévalence passant de 0,27 % à 0,82%, avant de retrouver en 2017 un niveau semblable à celui observé en 2000 (figure 2). L’analyse des facteurs sociodémographiques a montré que, chez les femmes, la prévalence des TS au cours de la vie était comparable quelle que soit la tranche d’âge analysée, tandis que chez les hommes, les plus jeunes (18-24 ans) et les plus âgés (65-75 ans) apparaissaient moins concernés que les autres. Les hommes veufs au moment de l’enquête étaient 2,5 fois plus à risque d’avoir fait une TS au cours de leur vie que les autres ; ce constat n’apparait pas valable chez les femmes. Le célibat, ainsi que le fait d’être divorcé, étaient associés aux TS pour les hommes et les femmes, tout comme le fait d’être dans une situation d’inactivité professionnelle et de percevoir sa situation financière comme « juste » ou « difficile » au moment de l’enquête ; en revanche, les personnes ayant un niveau de diplôme supérieur au Bac apparaissaient moins touchées par les TS au cours de la vie que celles ayant un niveau inférieur ou équivalent au Bac. Enfin, chez les hommes, le chômage semblait associé aux TS, même si ce résultat n’atteint pas le seuil de significativité (ORa=1,4 ; p=0,076). Les évènements de vie traumatisants, les problèmes intrafamiliaux et les violences sexuelles étaient fortement associés aux TS au cours de la vie. Ainsi, selon l’ordre d’importance, les violences sexuelles subies au cours de la vie multipliaient par 4,5 chez les hommes et 3,5 chez les femmes le risque de TS, les climats familiaux violents par 2,2 pour les deux sexes et les graves problèmes d’argent au cours de la vie par 1,7 chez les hommes et 2,2 chez les femmes. Le fait d’avoir été confronté au décès ou à la maladie d’un parent avant ses 18 ans était associé aux TS chez les femmes uniquement.
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