Après la tentative de suicide d’un.e proche

Table des matières
Introduction
Pourquoi ce guide
Quelques éléments clefs sur le processus suicidaire
Ce qui peut se passer au Service des urgences de l’hôpital
Le triage
L’évaluation médicale
Évaluation de la santé mentale
Les soins sans consentement
Plan de sortie pour votre proche
Prendre soin de soi pour mieux prendre soin de l’autre
Comment vous sentez-vous
Élaborer votre propre plan d’aide
Comment la tentative de suicide de votre proche peut-elle affecter votre relation ?
Comment soutenir votre proche après sa tentative de suicide ?
Créer un espace sécuritaire à la maison
Plan de sécurité pour votre proche
Réduire le risque de futures tentatives de suicide
Comment en parler autour de soi ?
Les propositions du Centre de Prévention du Suicide (CPS) Paris pour l’entourage
Consultation entourage
L’Entretien après un Geste Suicidaire (EGS)

Parole de Shae dans « Better Support research : Understanding the needs of family and friends when a loved one attempts suicide »

Introduction

Ce guide a pour but de vous aider lorsqu’un·e de vos proches a fait une tentative de suicide (TS) ou a manifesté des comportements suicidaires. Il fournit :

• Une compréhension de ce qui se passe pour une personne aux prises avec des pensées suicidaires.
• Des informations sur ce qui se passe à l’hôpital.
• Des repères sur les impacts d’une tentative de suicide d’un·e proche sur vous et sur la relation avec elle·lui·iel.
• Des recommandations sur la manière d’aider et de soutenir votre proche, sans s’oublier soi-même.
• Des questions à se poser avant d’aborder le geste suicidaire avec l’entourage.

Une tentative de suicide impacte tout l’entourage, qu’il soit familial, amical, et professionnel. Avoir un·e proche qui a fait une tentative de suicide peut susciter des sentiments très variés : frayeur, incompréhension, impuissance, culpabilité, colère contre soi-même, contre votre proche, contre les soignant·e·s, tristesse, lassitude, épuisement et/ou l’inquiétude que cela recommence.

Toutes ces réactions sont légitimes, et aucune n’est obligatoire. Aussi, elles ne sont pas linéaires. Elles s’inscriront dans le temps et évolueront selon les contextes.

Pourquoi ce guide ?

Au vu du peu d’informations sur la façon de prendre soin d’un·e proche après une tentative de suicide, ce guide aspire à proposer des repères de compréhension et des propositions pour faire face à un tel événement. Comment être présent·e tout en ménageant l’autre et soi-même ? Quand s’inquiéter ? Comment aider ? Comment en parler ? Tant de questions auxquelles ce guide tentera de répondre.

Même si cet événement est déstabilisant et effrayant, la tentative de suicide peut rendre visible une souffrance jusque-là difficilement perceptible.

Rappelez-vous qu’il est possible d’avoir de l’aide, car vous n’êtes pas seul·e.

Quelques éléments clefs sur le processus suicidaire

Le suicide est multifactoriel. Les raisons qui poussent les gens à tenter de se suicider sont nombreuses. Il n’y a pas d’explication unique et simple. Les facteurs de risque qui peuvent contribuer à un passage à l’acte suicidaire relèvent aussi bien du passé de la personne, de son parcours de vie, que des éléments présents au moment de la tentative de suicide. Les événements de vie douloureux, les ruptures, les pertes, un traumatisme psychologique/intergénérationnel, une pathologie physique ou mentale, l’abus de produits psychoactifs, la précarité, la marginalisation, la stigmatisation, les évènements socio-politiques sont autant de facteurs qui peuvent participer à un comportement suicidaire.

Le suicide est le résultat d’intenses souffrances devenues intolérables et traduit une perte d’espoir. Face à une détresse, installée dans le temps et devenue insupportable, la personne peut avoir le sentiment d’être dans une impasse. Elle a très souvent tenté de faire appel à ses différentes ressources, mais celles-ci n’ont pas pu permettre d’apaiser sa souffrance. Elle perd progressivement espoir que sa situation puisse s’améliorer. Le suicide s’impose progressivement comme l’unique solution pour s’en échapper. On peut entendre sa tentative comme une volonté de faire cesser sa souffrance et/ou de vivre autrement, non comme une réelle volonté de mourir. Le suicide apparaît donc comme une absence de choix.

• La détresse biaise la perception de la réalité.
En situation de crise, la détresse de la personne va “déborder” sur sa sphère rationnelle, la conduisant à un épuisement de ses ressources cognitives. Sa souffrance l’empêche d’évaluer calmement et objectivement les aides potentielles. Souvent accompagnée d’un fort sentiment de solitude devant sa situation, qu’il soit lié ou non à une situation d’isolement social, elle est souvent en difficulté pour accepter l’aide proposée. Pour elle, tout est voué à l’échec.

La honte d’avoir des idées suicidaires bloque la parole et la demande d’aide.
Les personnes qui ont des idées suicidaires ont très souvent honte de celles-ci, car elles peuvent se voir comme mauvaises, folles ou faibles. Elles peuvent se sentir déconnectées d’elles-mêmes et des autres, même lorsqu’elles sont entourées d’une famille et d’ami·e·s attentif·ve·s ou inquiet·e·s. Cette honte empêche d’en parler et ainsi de demander ou d’accepter de l’aide.

• Une tentative de suicide n’est jamais à banaliser.
Faire une tentative de suicide n’est jamais un geste anodin et doit toujours être pris au sérieux. Il peut prendre plusieurs formes, et être perçu comme de la manipulation, un acte courageux, lâche, etc., néanmoins, ces comportements traduisent toujours une souffrance.
Par ailleurs, les menaces et/ou tentatives à répétition peuvent désensibiliser l’entourage face à la gravité de la situation.
Le caractère supportable ou non de la douleur varie d’une personne à l’autre, de ce qu’elle traverse, et de ses ressources. Il est important de noter que c’est la perception d’une situation qui est à l’origine de la souffrance, et non l’événement en lui-même.

Pour aller plus loin : voir le guide « Mythe ou réalité ? » (disponible sur le site www.infosuicide.org)

Ce qui peut se passer au Service des urgences de l’hôpital

Lorsqu’une personne a fait une tentative de suicide, la priorité est de procéder à une évaluation médicale. Celle-ci peut être réalisée par les pompiers, le SAMU, les urgences de l’hôpital.
En fonction de la gravité, elle peut ou non être en mesure de parler pour elle-même.
Les proches peuvent être une source d’informations précieuses lorsque le personnel médical effectue ses évaluations.
Chaque expérience au service des urgences est différente, car chaque hôpital applique ses propres procédures. Cependant, il existe quelques lignes directrices générales sur ce à quoi vous pouvez vous attendre lorsque vous vous trouvez dans le service des urgences :

Le triage

Le processus de triage consiste à recueillir les informations personnelles de votre proche et à consigner les détails de la tentative. Les éléments suivants peuvent être utiles :

• Carte vitale et mutuelle s’il y en a une, AME, etc.
• Tous les médicaments et compléments dans leurs boîtes, ceux délivrés sur ordonnance et/ou en vente libre.
• Nom et coordonnées du médecin de famille et/ou du/de la psychiatre/psychologue/soignant·e.

L’évaluation médicale

Un médecin évalue alors l’état de santé de votre proche et s’occupe de ses besoins médicaux. Il peut aussi s’agir d’une surveillance afin de s’assurer de sa stabilité. Vous pouvez demander au personnel médical et à votre proche si vous pouvez assister à cette évaluation. Vous serez peut-être en mesure de fournir des informations essentielles, telles que :

• Tout accès à des armes, des médicaments ou d’autres moyens de suicide.
• Tout changement dans la prise des médicaments.
• Tout changement dans l’accès à l’aide professionnelle.
• Tout changement dans les pensées ou comportements de la
personne qui pourrait indiquer un problème de santé mentale.
• Si une lettre de suicide ou un testament a été rédigé.
• Si des biens ont été donnés.
• Si des violences de tout type (physiques, sexuelles, psychologiques) ont lieu ou ont eu lieu dans le passé.
• Tout antécédent de traumatisme psychologique ou d’événement traumatisant.
• Toute date anniversaire significative d’une perte ou d’un événement important.
• Toute consommation d’alcool et/ou de drogues.
• Antécédents de tentatives de suicide et de prise(s) en charge ou de traitement.
• Antécédents de suicide dans la famille ou dans l’entourage proche.
• Tout soutien professionnel, diagnostic et plan de traitement, ou absence de celui-ci.
• Une directive de santé, s’il en existe une.

Le processus d’évaluation des urgences prend du temps. Prenez donc un livre pour patienter, ainsi qu’un peu d’argent pour le café, la nourriture, le parking, etc.

Évaluation de la santé mentale

Après le triage, votre proche peut rencontrer un·e médecin des urgences ou un·e infirmier·ère spécialisé·e en psychiatrie d’urgence. Lors de cette étape, il est essentiel de partager toutes vos préoccupations avec précision. Par exemple, des remarques telles que : « Elle·il·iel se renferme, est souvent en colère, boit davantage depuis deux semaines, ne va pas au travail, etc. », peuvent être très utiles pour l’équipe médicale. Ces informations permettent de donner une vue plus complète de l’état actuel de votre proche et d’aider à établir un diagnostic plus précis.
Votre proche sera examiné·e et un plan de soins sera élaboré en fonction de cette évaluation. L’équipe des urgences interrogera probablement votre proche seul·e afin de recueillir son point de vue sans influence extérieure.

La suite du suivi peut inclure différentes options, telles que :
• L’admission à l’hôpital.
• Le maintien aux urgences pour la nuit.
• L’orientation vers une unité de stabilisation de crise.
• Le retour à domicile.

Si votre proche est admis·e à l’hôpital, assurez-vous de savoir dans quel service elle·il·iel se trouve et comment le contacter.
Dans tous les cas, assurez-vous de demander quel est le suivi mis en place, ainsi que les traitements envisagés. Le suivi est crucial pour réduire le risque de nouvelles tentatives.
Si le plan de sortie ne vous semble pas suffisamment sécurisant, n’hésitez pas à partager vos inquiétudes avec l’équipe médicale.
Exprimez des raisons précises, par exemple : « elle·il·iel a menacé de se tuer et m’a dit qu’elle·il·iel n’en parlerait pas à l’hôpital », plutôt que simplement « Je suis inquiet·e ». Cela aidera l’équipe à mieux comprendre vos préoccupations et à adapter les soins en conséquence.

Les soins sans consentement

Si vous ou le.la médecin êtes suffisamment préoccupé·e·s pour penser que votre proche court un risque élevé de suicide, des soins psychiatriques sans consentement peuvent être estimés nécessaires.
Dans ce cadre, vous pouvez être sollicité·e ou solliciter en tant que proche des « Soins psychiatriques à la demande d’un·e Tiers·e » (SDT).
Ce·tte tiers·e peut être un·e membre de la famille du·de la patient·e ou une personne justifiant de relations antérieures avec le.la patient·e, qui lui donnent qualité pour agir dans l’intérêt de celui·celle-ci. Cette personne a le droit de refuser ce rôle de tiers·e.
Votre·e proche restera autant que possible associé·e aux décisions et aux soins le.la concernant.
Les soins psychiatriques sans consentement peuvent prendre la forme d’un programme de soins (hospitalisation à temps partiel, soins à domicile, consultations ambulatoires, activités thérapeutiques) ou d’une hospitalisation complète.

Pour aller plus loin, voir la brochure « Droit en Psychiatrie. Le tiers et les soins psychiatriques sans consentement », sur le site : www.psycom.org

Plan de sortie pour votre proche

Un plan de sortie idéal comprend tout ou partie des éléments suivants :

• Tout suivi et/ou toute suggestion de l’équipe d’évaluation.
• Des informations permettant de savoir si votre proche sera revu·e, et si oui, quand, où et par qui.
• Les détails de toute orientation vers un autre service, et si la procédure vous a été expliquée.
• Le plan de sécurité, qui définit notamment qui appeler pour obtenir de l’aide, comment sécuriser l’environnement, les endroits où se rendre en cas de besoin (voir «Guide plan de sécurité»).
• Une liste des ressources locales, les lignes d’écoute comme le 3114, ou le dispositif Vigilans.
• Le plan de gestion des médicaments. Si des médicaments ont été prescrits, en particulier suite à une TS par ingestion médicamenteuse, vous pouvez demander qu’ils vous soient donnés et/ou qu’ils soient prescrits au compte-goutte afin que la personne n’ait pas accès à de grandes quantités le temps de la crise. Il est possible de demander un pilulier, un passage infirmier ou une délivrance dans son lieu de soin.

Avant de quitter l’hôpital, assurez-vous que ce plan de sortie soit clair pour vous et votre proche.

La crise suicidaire est circonscrite dans le temps.
Des idées suicidaires peuvent persister mais ne déterminent pas une autre tentative de suicide. C’est pourquoi une vigilance est nécessaire.

Prendre soin de soi pour mieux prendre soin de l’autre

« En cas de dépressurisation de la cabine, mettez d’abord votre masque à oxygène puis aidez l’autre à ajuster le sien. »

Comment vous sentez-vous ?

Après la tentative de suicide d’un·e proche,les impacts sur votre vie peuvent être émotionnels, sociaux, parfois financiers.
D’après les études d’expériences vécues par des proches aidant·e·s, beaucoup ont signalé la nécessité de combler le manque de soins professionnels lorsque la personne rentrait chez elle, ainsi que de maintenir une vigilance accrue, ce qui avait un impact sur leur propre bien-être et sur leur capacité à remplir leurs autres rôles et responsabilités.
En effet, les réactions émotionnelles après une tentative de suicide d’un.e proche peuvent être intenses et complexes, car c’est un événement bouleversant.
Vous pouvez :

• Vous sentir accablé·e, ressentir un stress psychologique accru.
• Vous sentir seul·e face à cet événement.
• Être en proie à des montagnes russes d’émotions, incluant l’incompréhension, la peur, la honte, l’anxiété, l’insécurité, l’engourdissement, l’impuissance, la trahison, la confusion, la colère, etc.
• Vous sentir sidéré·e, voire ne rien ressentir.
• Ressentir des impacts sur votre santé physique.
• Vous critiquer ou vous reprocher ce qui s’est passé, vous remettre en question.
• Vous sentir coupable d’avoir pensé ou dit certaines paroles à l’encontre de votre proche avant sa tentative de suicide.
• Vous sentir désespéré.e devant la souffrance, la maladie, la répétition éventuelle de passages à l’acte.
• Douter de votre capacité à faire face à la situation.
• Vous sentir épuisé·e et rencontrer des difficultés à accomplir les tâches quotidiennes, dormir, vous concentrer.
• Éprouver des limites à vos activités en raison de vos responsabilités en matière de soins et/ou de vigilance.
• Vos croyances et valeurs peuvent être ébranlées.
• Vous pouvez rencontrer des conflits familiaux ou professionnels qui n’existaient pas auparavant.

Nous rappelons que toutes ces réactions sont légitimes, et aucune n’est obligatoire. Elles ne sont pas linéaires, elles s’inscriront dans le temps et évolueront selon les contextes. Néanmoins, si vous ressentez tout ou partie de ces réactions sur une longue période et que cela devient envahissant, vous pouvez vous adresser à des professionnel·le·s de santé pour obtenir de l’aide.

Lorsqu’un·e proche tente de se suicider, nos réactions peuvent être affectées par des événements passés et des pertes importantes que nous avons subies dans notre propre vie. Par conséquent, nous pouvons réagir à la douleur, à la souffrance et au comportement suicidaire d’une autre personne comme à une menace potentielle pour notre propre bien-être et notre sécurité.

Élaborer votre propre plan d’aide

S’occuper d’une personne qui a des idées suicidaires peut être épuisant sur le plan mental, émotionnel et physique. Il est naturel de s’inquiéter pour son proche, et il peut être difficile de trouver un équilibre entre le soutenir et prendre soin de soi. Il est même aisé de reléguer ses propres besoins au second plan. N’hésitez pas à vous aménager régulièrement, si possible, des temps, même courts, pour vous.

Votre plan d’aide peut comporter :

• Les signes qui montrent que vous éprouvez une trop grande pression et avez besoin de relâcher.
• La liste des activités qui vous apaise, vous réconforte, vous aide à faire face à la pression.
• La liste de vos proches que vous pouvez contacter soit pour parler de la situation, soit pour justement parler d’autres choses.
• La liste et les numéros des personnes que vous pouvez mobiliser pour être présent.e avec votre proche qui a fait une tentative de suicide, lors de moments de vulnérabilités ou pour l’accompagner lors de ses entretiens.
• La liste des points de vigilances à avoir envers votre proche.
• Les numéros des soignant·e·s ou établissements pour votre proche en cas de crise.
• Les numéros des secours (18, 112 ou 15) ainsi que le 3114 (questions, évaluation d’urgence, etc.).

Dans tous les cas, ne restez pas seul·e avec l’évènement que vous venez de vivre. Demandez l’aide de votre famille, de vos ami·e·s, de la communauté, des associations, des professionnel·le·s sanitaires et sociaux, ainsi que des lignes téléphoniques comme le 3114. Il peut être utile de parler de votre expérience avec un·e professionnel·le qui n’est pas affecté·e par la situation.

Comment la tentative de suicide de votre proche peut-elle affecter votre relation ?

Lorsqu’une personne a fait une tentative de suicide, vos sentiments à son égard et vos relations avec elle peuvent changer. Par exemple, comment lui parlez-vous maintenant ? Vous sentez-vous mal à l’aise avec elle ? Devez-vous vous occuper davantage d’elle et êtes-vous plus anxieux·se et impliqué·e que d’habitude ? Il se peut que vous vous sentiez ou agissiez de manière plus protectrice, prudente, attentive, voire hyper-vigilante. En tant que proche, on peut rencontrer des difficultés à communiquer avec la personne qui a fait une tentative de suicide et avoir l’impression qu’on pourrait dire la mauvaise chose, empirer la situation ou trahir sa confiance.
Il se peut aussi que vous évitiez complètement la personne et que vous vous montriez plus distant·e.

Il est important de se rappeler qu’après une tentative de suicide, la relation peut également être différente pour la personne qui a fait la tentative. Elle aussi peut se sentir mal à l’aise et essayer de vous éviter. Elle peut se sentir dévastée, perdue, honteuse, embarrassée, coupable, avoir peur de l’avenir, craindre que vous lui retiriez votre amour ou que vous la jugiez, les idées suicidaires peuvent être encore présentes et même être en colère que les services d’urgence aient été appelés. Elle peut avoir le sentiment d’être dépossédée de sa possibilité de faire des choix. Il est donc important de lui demander son avis, même si vous n’êtes pas d’accord.
Il peut parfois être utile de dire à votre proche, sans le·la juger et sans culpabiliser, ce que vous ressentez. Cela peut vous donner à vous deux l’occasion de décider de la manière dont vous allez vous comporter et de communiquer vos besoins l’un·e avec l’autre.

Comment soutenir votre proche après sa tentative de suicide ?

Lorsque l’entourage participe activement au rétablissement de son.a proche, il constitue le facteur de protection le plus efficace dans la prévention des tentatives de suicide.

Les personnes qui ont tenté de se suicider se souviennent souvent que le sentiment d’appartenance à un groupe les a aidées à se rétablir.

Afin de prévenir d’autres tentatives et le risque de mort qui en découle, il est important que la personne dispose de soutiens et qu’elle puisse renouer avec des sentiments d’espoir. La communication est essentielle pour y parvenir. Chacun·e veut être vu·e, entendu·e et compris·e, car cela nous aide à nous reconnecter avec nous-mêmes et avec les autres.

Pour aider votre proche, si vous vous sentez disponible, acceptez d’accueillir sa souffrance sans jugement. Bien qu’il incombe en fin de compte à votre proche de veiller à sa sécurité, il peut avoir besoin de votre aide et de votre soutien pour y parvenir.

Parler à quelqu’un.e de ses pensées suicidaires ou de ses tentatives passées n’augmente pas le risque de suicide ; au contraire, cela diminue le risque en donnant à la personne l’espace de parler de ce qu’elle vit. Faites-lui donc savoir qu’il n’y a pas de mal à vous parler de ses éventuelles pensées suicidaires.

Si vous vous sentez capable, afin de favoriser une communication ouverte, honnête et respectueuse, il peut être utile de poser les questions suivantes à votre proche quand il·elle·iel est plus apaisé·e et s’il·elle·iel est en mesure de discuter :

• Comment puis-je être utile ? (Demandez lui d’être aussi précis·e que possible. Il·elle·iel peut avoir besoin d’aide pour les soins médicaux, la défense des droits, la recherche de ressources et la mise en relation avec des ressources).
• Puis-je prendre de tes nouvelles, et à quelle fréquence ?
• Dans quelle mesure te sens-tu en sécurité et as-tu confiance en toi pour assurer ta sécurité ?
• Comment puis-je intervenir si tu ne te sens pas en sécurité ?
• Comment savoir si je dois intervenir ?
• Comment savoir si tu n’es pas en sécurité ?
• Quelles sont les émotions les plus difficiles à gérer ?
• Quelles sont les choses qui te bouleversent ou qui te font penser
au suicide ?
• Qu’est-ce qui t’aide en ce moment ? Qu’est-ce qui ne t’aide pas ?

Il existe d’autres manières de soutenir votre proche, par exemple :

• Proposez une aide pratique (faire les courses, le ménage), ou financière.
• Participez à ses soins médicaux en tant que soutien ou en représentant ses intérêts.
• Proposez-lui de l’aider à prendre contact avec un·e spécialiste de la santé mentale.
• Participez à la sécurisation de l’environnement en limitant l’accès aux moyens (voir page suivante).

Cependant, il peut être difficile et effrayant d’entendre quelqu’un.e parler de ses pensées suicidaires.

Si vous ne pouvez pas entendre un·e proche parler de ses pensées suicidaires, discutez avec lui·elle·iel des personnes à qui il·elle·iel peut s’adresser. Vous pouvez lui faire comprendre qu’il est difficile d’entendre sa douleur et de le·la voir souffrir, mais que vous reconnaissez qu’il est important qu’il·elle·iel ait quelqu’un·e à qui parler de tout ce qu’il·elle·iel ressent et pense. Encouragez-le·la à informer quelqu’un.e s’il·elle·iel a des pensées suicidaires à l’avenir.

Si votre proche vous confie avoir encore des idées suicidaires et vous demande de garder le secret, évitez d’accepter. Il vaut mieux lui expliquer que vous ne cherchez pas à le·la trahir, mais que vous êtes inquiet·e et que vous avez besoin d’en parler à d’autres personnes, professionnel·le·s ou non.

Il vaut mieux un·e proche en colère qu’un·e proche mort·e.

Rappelez-vous que vous ne trahissez pas votre proche, vous faites cela pour l’aider.

Rappelez-vous qu’il est normal, et même nécessaire, de fixer des limites et de les faire connaître. Si vous savez clairement quelles sont les vôtres, vous pourrez plus facilement communiquer avec votre proche de manière sensible et bienveillante.
Dites-vous que vous n’êtes pas une mauvaise personne si vous maintenez vos limites. Faites part à vos proches de ce que vous pouvez et ne pouvez pas faire, de ce que vous ferez et ne ferez pas. Il faut parfois un peu de pratique pour apprendre quand et comment fixer ses limites.
Si vous ne vous sentez pas en capacité d’être présent·e pour votre proche, si vous vous sentez désabusé·e devant les répétitions, et/ou si vos limites sont atteintes, vous pouvez dire par exemple :

« J’aimerais vraiment t’aider, mais ce n’est pas quelque chose que je peux
faire pour l’instant. Je peux peut-être t’aider à trouver quelqu’un d’autre
qui peut le faire, ou t’aider à trouver comment le faire par toi-même. »

Plan de sécurité pour votre proche

Un plan de sécurité (disponible sur le site www.infosuicide.org) est un ensemble d’instructions à suivre lorsqu’une personne a des pensées suicidaires. Votre rôle peut être de l’aide à le remplir. Il peut arriver que vous remarquiez que quelque chose ne va pas avant la personne concernée. Discutez de ce qu’il convient de faire dans ce cas, afin que vous sachiez tou.te.s les deux quel est votre rôle.
Lorsque la personne est en crise, elle peut vous dire d’ignorer le plan : rappelez-vous qu’il s’agit d’un plan qu’elle a accepté lorsqu’elle se sentait bien.
Assurez-vous que votre proche dispose d’une carte indiquant les numéros de téléphone des lignes d’écoute locales et du 3114.
Pour aller plus loin, consultez le guide : «Comment aider un·e proche».

Réduire le risque de futures tentatives de suicide

On ne peut pas toujours empêcher un suicide, ni contraindre la personne à se saisir des aides proposées.

Les recherches montrent qu’un nombre important de personnes qui ont fait une tentative de suicide, en avaient déjà fait par le passé et courent un plus grand risque d’en faire une nouvelle, notamment dans l’année qui suit.
Quoi qu’il arrive, ce n’est PAS de votre faute.

Le soutien et les soins associés à un réseau social solide peuvent réduire considérablement ce risque et augmenter leurs raisons de vivre. Il est probable que votre proche aura besoin de beaucoup de temps et de soutien de la part de diverses personnes pour gérer les problèmes et les sentiments qui l’ont conduit·e à faire une tentative de suicide. Il est souvent nécessaire d’essayer et/ou d’associer différentes approches, différents accompagnements afin de trouver la bonne combinaison d’aide adaptée à chacun·e.

Malheureusement, certaines personnes qui tentent de mettre fin à leur vie ont déjà essayé dans le passé et/ou essaieront à nouveau. En prévision de ce qui pourrait arriver, vous éprouverez probablement des sentiments d’épuisement, de désespoir, et vous vous sentirez hyper-vigilant·e. Sachez que chacun·e réagit différemment à une tentative de suicide, que vous n’avez pas tort d’éprouver les sentiments que vous ressentez, et que ces derniers évolueront.

Parfois, l’espoir est trop difficile à imaginer pour votre proche, et en parler peut l’angoisser. Dans ces moments-là, le mieux que vous puissiez faire est de porter l’espoir pour lui·elle·iel. Il est important de se rappeler que les gens ne se contentent pas de surmonter ces expériences, mais qu’il peut aussi y avoir des changements positifs.
Les crises peuvent conduire à une meilleure compréhension de soi et à la découverte de ressources plus efficaces pour faire face aux situations problématiques.

Comment en parler autour de soi ?

Le suicide fait l’objet d’une stigmatisation encore très marquée dans notre société, et peut accentuer la honte d’en parler en tant que proche. Il peut donc être difficile de savoir comment parler de la tentative de suicide de son.a proche, voire s’il faut le faire, aux personnes extérieures.
En parler a toujours des conséquences et peut occasionner de la peur, des interrogations, du jugement, des représentations chez l’autre qu’il peut être difficile d’accueillir.
Avant d’en informer l’entourage, il est crucial de se demander :

• Vous sentez-vous en capacité de l’annoncer ?
• Qui a besoin d’être au courant selon vous ?
• À qui vous sentez-vous de l’annoncer ?
• Si non, à qui pourriez-vous passer le relais ?
• Quels éléments de contexte pourraient faciliter votre annonce et l’accueil de l’événement par l’entourage (temporalités, utilité, lieu, seul·e, entouré·e ou en présence de votre proche qui a fait la TS) ?

Il peut être aidant de discuter, quand et si son état le permet, avec votre proche qui a fait la TS, afin de définir avec lui·elle.iel les réponses à ces questions.

En parler avec des jeunes enfants, enfants et adolescent·e·s peut susciter davantage d’appréhensions. Néanmoins, il reste important d’en parler en fonction de son âge, pour l’aider à comprendre ce qui se passe.
En l’absence d’explication, un·e jeune enfant, un.e enfant ou un·e adolescent·e essayera toujours de donner un sens par lui·elle.iel même à cette situation inquiétante et à ce qu’il·elle·iel en perçoit.
Les jeunes enfants et enfants d’âge scolaire peuvent avoir des idées ou scénarii plus effrayants que la situation elle-même.
Ils.elles.iels peuvent, par exemple, se sentir responsables d’événements qu’ils·elles·iels ne comprennent pas et qu’on ne leur explique pas.
Il est indispensable de déculpabiliser un·e enfant face à la souffrance ou à une tentative de suicide de son·a proche.
Aussi, les adolescent·e·s peuvent ne pas vouloir parler directement de leurs inquiétudes ou de leurs sentiments.

Pour aller plus loin, retrouvez le guide : « Comment parler à un·e enfant/un·e adolescent·e d’une tentative de suicide. », (disponible sur le site www.infosuicide.org).

Les propositions du Centre de Prévention du Suicide (CPS) Paris pour l’entourage

Le Centre Prévention du Suicide de Paris (CPS) de la Fondation Elan retrouvé, est un centre ambulatoire spécialisé dans la lutte contre l’isolement et la prévention du suicide. Il accueille toute personne à partir de 16 ans en situation de crise psychique, suicidaire ou après une tentative de suicide. L’accueil est immédiat, gratuit et limité dans le temps. L’accompagnement est réalisé au sein de différents espaces, individuels et groupaux par l’équipe du CPS Paris : accueil, psychologues, psychiatre, travailleu·r·se social·e, médiatrice en santé, médiations artistiques. Il est également un appui aux professionnel.le.s et réalise également des actions de sensibilisation et de formation. C’est également un espace de ressources via le site : www.infosuicide.org.

Consultation Entourage

Le CPS Paris propose des consultations pour l’entourage de proche ayant fait une tentative de suicide. Seul·e, en couple ou en famille, cette consultation offre un espace et un temps où peuvent être déposés inquiétudes et questionnements. Elle propose également un espace de réflexion sur les positionnements et conduites à tenir auprès de votre proche.

L’Entretien après un Geste Suicidaire (EGS)

Constatant que la TS peut être seulement évoquée, voire ne jamais être abordée, entre le·a patient·e et le·a soignant·e (manque de temps aux urgences, souci d’aborder autre chose de la part du·de la patient·e et/ou du·de la professionnel·le), le CPS Paris propose un temps et un espace de parole spécifique sur la tentative de suicide avec la personne suicidante.
Cet échange rétrospectif de verbalisation et de mise en sens tend à une meilleure compréhension par le·a patient·e de son état émotionnel et de son raisonnement au moment du geste suicidaire.
Une TS constitue un facteur de risque majeur de réitération suicidaire. Cet entretien spécifique permet aux professionnel·le·s une évaluation approfondie de ce risque.
En questionnant notamment le ressenti d’être encore en vie et le rapport aux idées suicidaires suite à une TS, cet entretien peut constituer un premier espace de réflexion sur ses vulnérabilités, et/ou être complémentaire à un suivi en cours lorsqu’il y en a un. C’est aussi une manière de ne pas banaliser ni dramatiser la tentative de suicide.

Références des documents cités :
Le tiers et les soins psychiatriques sans consentement, Psycom, janvier 2022, www.psycom.org/
Guide infosuicide.org : «Comment aider un·e proche», 2022, www.infosuicide.org/
Guide infosuicide.org : «Mythes ou réalité ?», 2022 www.infosuicide.org/
Guide infosuicide.org : «Plan de sécurité», 2022 www.infosuicide.org/
Guide infosuicide.org : « Comment parler à un·e enfant /un·e adolescent·e d’une tentative de suicide », 2025 www.infosuicide.org/

Autres sources du guide
After a Suicide Attempt – A Guide for Family and Friends Canadian Association for Suicide Prevention (CASP), 2012 www.suicideprevention.ca/
How to Talk to a Child about a Suicide Attempt in Your Family, MIRECC, Sept 2021 www.mirecc.va.gov/
Better Support research : Understanding the needs of family andfriends when a loved one attempts suicide, june 2020 www.sane.org/

Guide élaboré par Thibaud Gravrand, Amyr Ben Cheikh et Siegrid Darquet.
CPS Paris Fondation Elan Retrouvé.